Ich

      Nous nous rendons à Ich, village de 300 habitants, à 60 Km à vol d’oiseau de Figuig et 150 Km de route qui se termine par 20 Km de piste, cul-de-sac marocain avant la montagne et le désert algériens. Ich est inconnu de tous les guides européens sauf le Gandini qui le consacre « coup de cœur. »

     Ich ne se décrit pas, ne se raconte pas, ne ressemble à rien de connu. Il faut y aller et y vivre. On aime ou on fait demi-tour avant. Nous avons aimé passionnément.

Arrivés vers 15h, nous sommes accueillis par l’adjudant-chef, son adjoint, son chauffeur, les deux jeunes instituteurs et quelques curieux. L’adjudant, responsable de la sécurité nous indique où nous installer en toute tranquillité et en toute sécurité le temps qu’il nous plaira. Quelques palabres : « Mais comment êtes-vous arrivés jusqu’ici ? demande avec insistance un instituteur. Vous venez de Figuig ! C’est vrai que Zidane et Djamel Debbouze assistent au festival ? Rumeurs étranges car s’ils y étaient nous aurions vu des attroupements monstres.

               La piste vers Ich                                                   Arrivée à Ich

A peine installés pour manger alors que tous nos hôtes se sont retirés discrètement, on nous apporte une théière et 4 verres (pour les Chibani et nous) sur un petit plateau Coca-Cola. Pas de bruit, pas de dérangement jusqu’à ce que nous sortions admirer le paysage Puis nous aurons droit à la visite guidée et commentée par l’adjudant et les instits : le village, les jardins, l’école…Nouveau thé chez  les instits et le soir, on invite l’adjudant à l’apéro. (Les instits ne boivent pas d’alcool)

                        L'adjudant et le gros lézard

     Le militaire se montre très loquace sur sa vie privée. Sa famille vit à Oujda et il la voit tous les deux ou 3 mois. Sa femme possède toutes les qualités. Elle élève seule leurs enfants et gère entièrement ses finances car à Ich il est logé, nourri et ne dépense quasiment rien. C’est elle qui a surveillé la construction de leur maison de trois étages (le rez-de-chaussée pour le couple, un étage aux enfants et un étage en location, en prévision de sa retraite) Cela a pris plusieurs années, elle a vendu une partie de ses bijoux, économisé sur la solde, géré le prêt bancaire. Bref, d’après lui, il ne s’est occupé de rien et tout a été fait au mieux. En revanche, et on l’a constaté chez d’autres Marocains, il considère les femmes en général comme perverses, menteuses, méchantes, empoisonneuses, nombreux exemples longtemps racontés à l’appui. L’apéritif dure de 20 à 23 heures puis il nous quitte « pour faire sa ronde de sécurité dans le village ! »

Notre parking à Ich

      Nous avons envie de rester une journée de plus et les Chibani se rangent à notre avis.

     Le lendemain le temps passe vite : nous invitons les instits et l’adjudant au déjeuner (assiette de crudités, tajine-poulet et fraises à la crème) et le soir les instits tiennent à nous rendre l’invitation alors que nous sommes deux de plus, un couple de Héric rencontré à Figuig. Nous visitons l’école de 27 élèves avec ses deux classes et l’instit des grands invite les enseignants retraités (Gaby et moi) à assister à la correction d’un contrôle de français. Nous trouvons que le niveau et les exigences sont élevés. Nouvelle visite plus complète encore de la palmeraie, la source et le barrage, les hauteurs qui encadrent le village d’où l’on voit au loin les postes de guet algériens.

           Une classe très décorée                              Regardez l'objectif !

Tous les élèves, leurs instits et nous

La frontière semble être une préoccupation importante de l’adjudant-chef. Le repas chez les instits – un plat unique très copieux de leur invention- constitué de riz cuit avec des légumes et du beurre de chèvre garni d’une sauce tomate au thon et à l’œuf, dans lequel chacun pioche avec sa cuiller – est un moment très convivial où ils sont fiers de nous montrer qu’ils reçoivent 320 chaînes gratuites dont TV5 pendant les 4 heures quotidiennes où fonctionne le groupe électrogène fourni par l’état.

       Repas chez les instits                                   Menu de la cantine scolaire

       A 22h30 précises, tout le village se retrouve dans le noir, plus d’éclairage, on allume la lampe à gaz. On apprendra le lendemain matin en visitant le dispensaire que seul l’infirmier du village dispose de l’électricité fournie 24h/24 par des panneaux solaires qui alimentent deux grosses batteries, puis un convertisseur fournit en 220 tout le dispensaire y compris le logement de fonction. L’infirmier sera la dernière personnalité qui nous invitera à boire le thé après nous avoir fait visiter son dispensaire, fier à juste titre de son équipement et de son état de propreté. Nous partirons donc le surlendemain de notre arrivée après une dernière visite à l’école, photos de classe et salutations, peu avant midi… Nous avons offert des chaussures et des vêtements pour les enfants et le couple breton un tire-venin qui sera précieux à l’infirmier. Si on revient l’an prochain comme on l’espère, on apportera des livres de niveau primaire et des médicaments dont on nous promet la liste.

                  Personnalités du village : Mohammed l'instit, le Cheikh, l'adjudant

       On se quitte à regret, beaucoup de photos à envoyer et un instit me dit : « Vous allez nous manquer ! » Sur la piste du retour un jeune conducteur qui travaille à la construction de la route et qui m’avait demandé la veille de le photographier au volant de son gros camion me crie en passant : « LA PHOTO !! »

Le dispensaire

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